« Comment prolonger l’activité des seniors ? » – compte-rendu du petit-déjeuner du 4 juillet 2019 avec François-Xavier Albouy

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Les débats s’appuient sur le livre « L’erreur de Faust, essai sur la société du vieillissement »

La société du vieillissement

La moitié des personnes qui liquident leur retraite sont au chômage ou en maladie. Quels sont les leviers pour prolonger l’activité professionnelle et valoriser l’apport des retraités à la société ?

Dans le livre, on pose un nouveau concept, la « société du vieillissement ». C’est un phénomène massif, mondial et rapide. Il a un fort impact sur la politique. Il y a 5 ans, il y avait deux jeunes de moins de 15 ans pour un senior. Dans 10 ans, il y aura un jeune de moins de 15 ans pour un senior. Cela implique des réflexions sur la fin de carrière et le maintien dans l’emploi. Il y a aujourd’hui un tiers de la population à la retraite, et on passe en moyenne un tiers de vie à la retraite.

Cette évolution a deux origines qui sont irréversibles : les progrès de la médecine, et la libération de la femme (qui ont des enfants plus tard et en ont moins). L’âge moyen progresse donc rapidement, et on ne va pas remettre ces progrès en cause. Autrefois, le vieillissement était perçu comme cyclique, mais il ne l’est plus. En France, le vieillissement a commencé en 1709 avec des mariages tardifs dans l’aristocratie normande. Cela explique pourquoi il y a eu moins d’émigration française vers l’Amérique.

L’objectif n’est pas de faire plus d’enfants, mais de mieux accueillir les jeunes. En effet, plus la société vieillit et moins elle fait de place aux jeunes. (L’immigration n’est pas la solution. On prévoit 64 millions de baisse de la population de l’Europe.) Au Japon, il y a eu une classe d’âge pour laquelle 50% des trentenaires n’étaient pas entrés sur le marché du travail. Ça a changé depuis. On a l’impression que le pays va disparaître comme ont disparu les villages de nos arrière-grands-parents.

Considérons le bien-être. Depuis 30 ans, les études montrent qu’il ne dépend pas du revenu, mais de trois leviers :

  1. Souci des autres : activité socialisée engageante et altruiste
  2. Souci de soi : entretien physique et activités réflexives
  3. Apprentissage de nouvelles connaissances.

D’après une étude du Lancet, si on a les trois conditions, l’entrée en dépendance est retardée de 5 ans, et il y a moitié moins de dépendants. Par exemple : la doyenne de l’humanité au Japon a beaucoup d’activité toute la journée.

La retraite

Au 19ème siècle, la retraite a été le moyen de résoudre le problème des vieux travailleurs qui n’étaient plus en capacité de travailler. Quand un tiers de la population est concernée, les actifs ont sur eux une grosse pression pour payer les retraités et l’éducation des jeunes.

Comment mieux s’organiser ? En Angleterre, le NHS prescrit des activités socialisées. En France, nous avons une vision manichéenne : actif ou retraité, autonome ou pas autonome. Le problème pour reculer l’âge de la retraite est le marché du travail. Les départs sont donc peu glorieux et avec de l’aigreur. Ceci crée un symptôme de déprise qui peu conduire à la dépression.

La hausse de l’âge de départ a augmenté le chômage et la pression sur les régimes de prévoyance sociale d’entreprise. Nous sommes au maximum de nos capacités à 45 ans. Voilà pourquoi le marché du travail est centré sur les quadras. Si l’on étatise la protection sociale, c’est contraire aux trois leviers du bien-être vus précédemment. Et l’Etat n’a pas forcément le monopole de la solidarité légitime.

A l’international, le problème est le même. On craint l’impérialisme de la Chine, mais elle doit faire face au mur du vieillissement. L’Inde aura le même souci dans 50 ans.

Les pistes de solution

La solution passer par favoriser le cumul emploi-retraite, notamment via le mécénat de compétences. Cela pourrait être financé par les gains sur l’assurance chômage et la prévoyance collective. Les CSP++ n’ont pas de difficulté pour organiser leur cumul emploi-retraite, mais comment font les professions intermédiaires. Par exemple, un ancien chef de chantier a des compétences de gestion multiculturelle et de logistique, mais ne s’autorise pas à les utiliser dans une association caritative.

On pourrait imaginer des formations courtes à l’université pour préparer son activité à la retraite, voire un Erasmus des seniors.

Le risque dépendance est lié inconsciemment au risque de Tithon (qui avait la vie éternelle mais pas la jeunesse éternelle). Cela explique pourquoi les seniors bloquent leur épargne.

Questions-réponses

Q : L’espérance de vie augmente. L’entrée sur le marché du travail se fait plus tard et on travaille jusqu’à 70 ans alors que les entreprises mettent de côté les plus de 50 ans. Que fait-on pendant 20 ans ? Comment valorise-t-on les compétences des plus de 50 ans ?

Le problème n’est pas uniquement français et concerne la gestion démographique de l’entreprise. Cela requiert de la formation tout au long de la vie, et un changement culturel sur ce qu’est une carrière réussie.

Un exemple sur l’approche culturelle : deux villages vieillissants au Canada. Les habitants de l’un à Terre-Neuve ont abandonné le village et se sont relocalisés sur le continent. Les habitants de l’autre en Alberta ont lancé un tutorat de jeunes d’Amérique latine qui a relancé le village.

Q : Quel est le rôle de l’Etat ?

Assez limité car il est terriblement endetté et n’a pas de gestion de long terme.

Q : Quid de la retraite progressive ?

Il y a au Japon des dispositifs en biseau : 30% de salaire en moins, compensé à 20% par l’Etat, ce qui est moins cher que le chômage.

Q : Fin du système de 1945 à cause d’un focus sur la rentabilité ?

En France, l’avantage est un meilleur équilibre démographique sur le reste de l’Europe.

La création d’une plateforme pour gérer les activités socialisées des seniors serait un plus.

Q : Qu’apporterait un changement de notre vision de l’activité ?

Plus de fluidité mais il y aurait un problème de transition.

Q : Comment améliorer la qualité du débat ?

C’est difficile car cela renvoie chacun à son angoisse de la mort. Pour cela il faut des associations puissantes. Dans les pays nordiques, les fonds de pension sont mutualistes et paritaires. Le plus grand lobby au monde à l’AARP : l’American Association of Retired Persons.

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